1 juin 2010

INTER-SÉMINAIRE : Partages de savoirs à Paris

Nos expérimentations ne peuvent pas se conformer au devenir-entreprise de l'université, ni à ses marges attitrées. Car nous voulons inventer, nous voulons nous rencontrer ; créer des façons d'être ensemble et des rapports au savoir qui ne concèdent en rien aux politiques actuelles ; et mettre en question ensemble politique des savoirs et production commune de savoirs politiques.
Nous donnons rendez-vous les 4-5-6 juin 2010 à La Générale à la manufacture – 6 Grand Rue 92310 Sèvres (M° Pont-de-Sèvres) – pour élaborer ensemble des formes d'action et de réflexion collective après un an de pratiques diverses mises en place un peu partout (à Lyon, Toulouse, Rennes, Bruxelles, Paris…) – nous demander où nous en sommes, où nous allons – trois jours, entre rencontres, discussions libres, et ateliers de recherche.


A l'occasion des mouvements de ces dernières années nous avons expérimenté des formes de recherche et de relation au savoir en résistance aux modèles dominants qui tendent à s'imposer. Indépendamment de la réussite ou de l'échec des différentes séquences de lutte passées ou à venir, l'autonomisation de ces pratiques tant par rapport aux pressions économiques que par rapport aux cadres universitaires classiques - ouvrent sur un champ à explorer. S'y est fait jour, grâce au temps de la grève, l'intensité proprement politique du rapport entre la théorie et la pratique. Nous créons un "inter-séminaire" qui a pour vocation de faire résonner entre elles ces expériences (séminaires de grève autogérés, groupes de réflexion et de recherche ouverts, mises en pratique de l'université expérimentale, etc.) afin qu'elles s'enrichissent mutuellement et qu'elles puissent mettre en commun des réflexions et des réalisations. Cet inter-séminaire est ainsi à la fois l'opportunité d'échanges ponctuels et suivis, où des questions et des relations de sens communes émergent, et l'une des formes de l'énonciation de nos revendications dans le tissu des relations d'amitiés et des solidarités multiples et constantes nées dans le cours de ces mouvements.

ATELIER 1 – Errance et apprentissage
ATELIER 2 – Espaces publics oppositionnels
ATELIER 3 – Mémoire des luttes, expérience des luttes
ATELIER 4 – Imaginaire(s), poétique et politique : quelle est la part de l'imaginaire, du sensible et du sens dans les politisations actuelles ?
ATELIER 5 – Aliénation et travail
ATELIER 6 – Minorités
ATELIER 7 – Atelier permanent orienté archive/micro-édition/édition électronique
ATELIER 8 – Féminismes et Révolution
ATELIER 9 – Qu'est-ce qu'un collectif ?

Contact : jo (AT ) inter-seminaire.org
Site Internet : http://inter-seminaire.org

« Si des gens qui ont participé à un collectif pensent qu’ils ont découvert quelque chose, qu’ils ont fait avancer quelque chose, il faut effectivement qu’ils puissent le dire, le publier, créer des formes de communication, d’expression, d’espaces publics, qui soient vraiment régis par leur propre temps, et complètement en décrochage par rapport aux temporalités aussi bien systémiques que stratégiques »
Jacques Rancière, 27/01/10 Ensba.

Le programme proposé est modulable et les nouvelles propositions sont les bienvenues.
Le vendredi matin aura lieu une présentation des séminaires présents en faisant retour sur l'année, les problématiques, projets, difficultés rencontrées, etc.
On propose ensuite une série d'ateliers de 3 heures, organisés sur le vendredi après-midi, samedi et dimanche.
On commencerait par un travail de problématisation élaboré en commun à partir de toutes les propositions et matériaux qui pourrait être portés le jour même (textes, affiches, documents audio ou vidéo, etc.) afin de mettre tout cela en relation, d'en débattre, dans l'horizon d'un travail d'écriture (compte-rendu de séance ou production commune) et de ces trois jours ensemble.

ATELIER 1 – Errance et apprentissage

A) Une réflexion sur pédagogie et absentéisme ; qu'est-ce que le "droit à l'errance" dans les expériences de pédagogie nomade (cf. documentaire "errance", http://audioblog.arteradio.com//Pedagogie_Nomade/frontUser.do?method=getHomePage). Un documentaire radio de 6 minutes pourra introduire à quelques problématisations. (Séminaire sur l'Émancipation)
B) Apprentissages et dispositifs matériels de l'errance : rapport à l'espace de certains squatteurs : l'errance comme capacité à la dérive et différentes pratiques du territoire urbain, de la guerre de tranchée au village nomade, comparaison entre Paris et Lyon. (Séminaire Propriété et Résistances)
C) Déchiffrer l'errance à partir de la conception foucaldienne de l'occupation de l'espace : dispositifs architecturaux et pratiques de liberté, Michel Foucault, Dits et écrits II, "Espace, savoir et pouvoir", p. 1094-1097 (4 pages, si quelqu'un pouvait les scanner).
On pourra proposer, à partir des cartes et de quelques textes de Fernand Deligny - qui accompagne et organise une vie avec des enfants autistes dans les années 60 au coeur descévennes - une réflexion sur la construction d'un territoire : lignes d'erres et trajets quotidiens.

ATELIER 2 – Espaces publics oppositionnels (samedi et dimanche)

A) Université oppositionnelle. Comment déployer à l'université des lieux de luttes - on peut partir de ce qu'Emmanuel Barot appelle l'"Université oppositionnelle" dans son livre "Révolution à l'université", où l'oppositionnel désigne une forme de radicalité pouvant croiser des modalités d'action multiples et ouvrir l'université sur l'extérieur. Il s'agira d'explorer les pistes d'un processus de résistance à l'université et au-dehors qui ferait tenir ensemble de nombreuses pratiques (grève, sabotage, désobéissance, séminaires autogérés, production de textes, initiatives diverses en lien avec l'extérieur, etc.), et des modalités de construction en son sein des linéaments d'une démocratie radicale. Cf. également l'article de Yves Citton "Démontage de l'université, guerre des évalutations et lutte des classes" (RILI n°11), et l'"Esquisse d'une contribution à la critique de l'économie des savoirs" (Sibertin-blanc/Legrand). (Séminaire sur l'Emancipation et Comité 227)
B) Espace public oppositionel, mises à l'épreuve de Negt. (Université Alternative de Lyon)
C) Espace public plébéien : il s'agira de présenter brièvement la conception d'un espace public plébéien esquissée par l'historienne A. Farge dans son livre écrit en réaction à Habermas, Dire et mal dire. Comprendre le déploiement d'un espace commun de parole et d'action à partir de l'affirmation d'une égale capacité de chacun engage la mise en cause du statut d'un tel dire, affirmation d'une intelligence et collectivisation d'une information, une opinion vraisemblable tout au plus, qui ne fait qu'enclencher un cycle de circulation du dire. On partira de quelques anecdotes proposées par Farge pour proposer quelques pistes théoriques à la discussion collective. (Séminaire Propriété et Résistances).

ATELIER 3 – Mémoire des luttes, expérience des luttes

Réactivation/actualisation de certains événements dans la conjoncture actuelle (exemple du film de Watkins sur la Commune ; ou encore, les possibilités ouvertes par Mai 68 en termes de résistance pour aujourd'hui, cf article d'Irène Pereira dicutable mais intéressant : http://www.sens-public.org/spip.php?article634). Réflexion sur la manière dont se constitue la mémoire des luttes, et sur la puissance que peuvent transmettre aux luttes présentes l'expérience des luttes passées ? Tentatives de collecter les expériences et témoignages divers à partir des mouvements (universitaires ou non) de ces dernières années, des diverses initiatives politiques mises en oeuvres.

ATELIER 4 – Imaginaire(s), poétique et politique : quelle est la part de l'imaginaire, du sensible et du sens dans les politisations actuelles ?

Comment articuler les pratiques de réappropriation du savoir à la production d'un langage commun, de schèmes et d'images intégrant une dimension esthétique ou littéraire ? Comment sortir du prosaïsme des formes de militantisme classique et d'une critique sociale trop rigidifiée, pour comprendre, au filtre du désir et de l'imagination, les véritables logiques à l'oeuvre dans l'émergence d'une subjectivité en rupture, et dans la volonté de créer collectivement d'autres manières de vivre ? On pourra mener cette interrogation à partir du "Manifeste pour les produits de haute nécessité" publié par des intellectuels antillais (http://www.afrik.com/article16280.html) qui propose d'ajouter le "poétique" au "prosaïque"; à partir également du concept de "poétique du savoir" présent chez Rancière, qui permet de penser un rapport au savoir indicsiplinaire et non-hiérarchique (prenant en compte les savoirs asujettis) susceptible de nourrir les pratiques de recherche politique autogérée. La question des imaginaires peut être envisagé à partir de plusieurs travaux récents sur la question, qui prennent acte de la faiblesse actuelle d'un imaginaire de l'émancipation (Mona Chollet, "Rêves de droite", Yves Citton, "Mythocratie. Storytelling et imaginaire de gauche", Marc Augé, "La guerre des rêves").

ATELIER 5 – Aliénation et travail

A) Documents des l'Université Autogérée de Lyon (à préciser).
B) "La reprise du travail aux usines wonder", plan séquence de 9 min. Une jeune femme qui, au vu de ce qui s'est passé, ne veut reprendre le travail. On pourra observer, si ces thématiques résonnent avec des réflexions autour du travail, de l'aliénation ou de la conjoncture mai 68, la position de cette ouvrière au seuil de son usine, qui ne veut pas y pénétrer, s'opposant à un représentant du syndicat appelant à la reprise du travail. De quel différentiel l'émancipation est-elle porteuse dans le réel, par rapport au discours patronal mais aussi syndical - "étape par étape, acceptant les compromis, nous parviendrons à la victoire" ?
C) Dans ce cadre, Efflam et Léa se proposent de passer un Medvedkine le soir et d'inviter un intervenant (qui a édité les inédits de Medvedkine et en plus a édité Deligny).

ATELIER 6 – Minorités

Au croisement de la question de la mémoire des luttes au sein des discours et des enjeux de quelque chose comme des "minorités", on pourra lire le texte de Foucault autour des savoirs assujettis : Michel Foucault, Il faut défendre la société, cours du 7 janvier, p. 6-17. (Plus long mais si on parvient à scanner les pages 6-11, ce serait peut-être bien) mémoire post-coloniales une émancipation des minorités aliénées, dans quelles conditions ? Entre exigence politique et identitaire de la "centralisation" et nécessité de l'ouverture sur le dehors vers le vivier des autres luttes radicales, les indigènes de la République appelle à la construction d'une "organisation politique antiraciste et décoloniale autonome", on pourra confronter quelques uns de leurs manifestes avec les analyses de Deleuze sur les agencements collectifs repris par G. Sibertin-Blanc dans l'article "L’analyse des agencements et le groupe de lutte comme expérimentateur collectif" (voir aussi G. Deleuze : "Trois problèmes de groupe", L'île déserte...). Sur un mode moins universitaire d'autres matériaux seraient proposés à partir d'interviews, de textes et de bandes sons issus des franges révolutionnaires du rap français (Casey, Skalpel, La rumeur...).

ATELIER 7 – Atelier permanent orienté archive/micro-édition/édition électronique

L'idée est que chacun vienne avec textes, tracts, photocopiés ou sous forme numérique, les comptes-rendus des séminaires ou archives audio, les textes lus et les textes d'exposés, les bibliographies non exhaustives, etc., etc. dont on pourrait tirer une archive (toujours partielle) à publier sur le site de l'inter-séminaire et à faire circuler, ou encore faire le projet d'une micro-édition qui parle de cette expérience qui pourrait être publiée en PDF et photocopiée. L'atelier permanent, fonction du matériel porté, ouvrira sans aucun doute sur tout un tas de discussions improvisées.

ATELIER 8 – Féminismes et Révolution (dimanche après-midi)

Aujourd'hui, la question du féminisme est abordée un peu partout dans les initiatives d'universités sauvages, les séminaires et groupes autogérés à l'université et ailleurs, de même qu'existe une importante production de la recherche universitaire suivant diverses tendances qui traversent des conflits, échangent entre elles, etc.
Nous proposons de faire le point sur cette question du ou des féminismes et postféminismes, de la question du genre, sexes et sexualités et des formes de vie, et de l'apport des mouvements féministes dans la théorie et la pratique politique. Avec la participation d'Elsa Dorlin.

ATELIER 9 – Qu'est-ce qu'un collectif ? (samedi et dimanche)

Durant l'année sur le point de se finir, s'est tenu au département de philosophie de l'Université Paris 8 St-Denis un séminaire « étudiant ». Sans enseignant, ouvert à n'importe qui voulait y participer. Nous l'avons pensé comme le lieu où pourraient se croiser d'autres lieux, où aussi pourraient se croiser ce qui cherche à avoir lieu, ce qui se tient dans plusieurs lieux, ou plusieurs non-lieu. Ainsi les différentes tentatives dans lesquelles nous étions engagés, les rencontres que nous avions pu faire...
S'il fallait définir une direction que nous avons suivi, une question qui nous a traversé, alors qu'est-ce qu'un collectif ? Peut-être pourrait-on préciser quelles sont les questions politiques qu'il pose, et qu'il se pose ? Bien sûr on se retrouve là avec la bizarre affectivité qui entoure le terme de politique. Le séminaire aura été l'occasion de le confronter, de confronter nos pratiques à d'autres champs, l'art la psychothérapie institutionnelle. On pourrait critiquer la séparation entre ces champs, y voir à tout prix du politique. Notre pari est plus d'essayer de considérer d'où on part, pointer le lieu d'où l'on part, et comment en se confrontant, de l'hétérogène s'aggrège, s'agence, et trace de nouvelles directions, ouvre de nouvelles perspectives. Comment l'art questionne l'action, la manière de reprendre la question du travail et de la grève par exemple.
La psychothérapie institutionnelle nous questionne elle peut-être plus quant à la question du collectif. Comment ce qui se passe à la clinique de la Borde par exemple peut inspirer des manières de penser nos rapports, et de nouvelles manières d'être ensemble.
Avec la participation de Sophie Gosselin et David gé Bartoli.

1 commentaire:

  1. N'hésitez pas à nous rejoindre dés demain soir jeudi ou vendredi : nous avons pris toutes dispositions d'hébergements-cuisine-etc. à la Générale en manufacture à l'occasion de l'inter-séminaire et les personnes qui souhaitent y être hébergées pour les trois jours devraient simplement porter sacs de couchage et tapis de sol s'il y a.

    Les nouvelles propositions d'ateliers, films, etc. sont également les bienvenues, et nous avons imaginé un 'atelier permanent' sans programme où chacun est invité à porter archives, textes et tracts, vidéos, etc.

    RépondreSupprimer